Bonsoir, voici mon dernier texte pour participer à l’agenda ironique de novembre et continuer d’écrire pour le Nanowrimo ! Pour une fois que je suis dans les temps, je vous le poste tout de suite ! Pour ce mois-ci, dans ce challenge hébergé chez Les carnets paresseux, il fallait parler d’ombre, y ajouter de l’ironie, quelques dates, se laisser porter et placer pourquoi pas cette phrase « Je ne m’attends pas à ce que vous croyiez cette histoire. Est-ce que j’y crois, moi ? ». Voilà ce que ça a réveillé chez moi ! Bonne lecture !
— Je suis désolé, je ne vous vois pas dans le registre.
— Comment, mais c’est tout bonnement impossible !!! Revérifiez tout de suite, ordonna Steven.
— C’est la troisième fois que je le fais, vous me voyez navré, votre ombre n’est pas encore arrivée, indiqua l’agent en secouant la tête pour appuyer ses propos.
— Mais, mais… comment je vais faire moi sans mon ombre ? J’ai une réunion dans le désert à 13h12 pour être précis ! Tout le monde sera là ! Mon patron, mes associés ! J’allais conclure l’affaire du siècle, the affair of the century ! s’écria Steven, dont l’agacement commençait à transparaître, dans les propos, et sur la chemise, aux aisselles.
— Je suis désolé pour votre affaire of the… quoi ? demanda poliment l’agent en fronçant les sourcils.
— Laissez tomber. Et on peut pas en louer une ?! coupa Steven, dont l’espoir semblait pouvoir renaître.
— Ah non, je suis désolé, mais toutes nos ombres sont confidentielles, je ne peux pas les prêter à un client, ce serait aller contre le règlement…
— Règlement ? Quel règlement ?! La charte Lucky Luke ?
— Plaît-il ? s’enquit l’agent, sans se départir de son calme. Un calme insupportable de l’avis de Steven qui lui, le perdait clairement devant l’absurdité de la situation.
— Pardon mais j’ai jamais entendu une aussi grosse bullshit de ma life, et je travaille dans un bureau de marketing ! ricana Steven, que la colère faisait dire des gros mots, de préférence dans la langue de Shakespeare.
— Nous tenons à la confidentialité de nos clients et prenons très au sérieux le soin que nous apportons à chacun d’entre eux. Il est très important que leurs ombres restent… dans l’ombre justement.
— Vous vous moquez du monde ?
— Nullement, répondit l’agent, en souriant.
— Soit. J’ai pas que ça à faire. Alors, vous avez sûrement une ombre qui me ressemble dans votre stock… Grande, plutôt svelte, ça court quand même les rues, une ombre de sportif !
— Chaque ombre est unique, monsieur.
— Oui, oui, vous n’allez pas dire le contraire. Alors, combien vous en voulez ? Je vous en prends une, là tout de suite pour quatre heures, allez cinq heures tops, pour être sûr de conclure le deal…
— Je regrette, nous ne les louons pas, monsieur.
— Je vous file cinq-cents balles !
— Les ombres ne sont pas à louer, monsieur.
— 1000 balles ! 1000 balles, je pique une ombre, là, et je la ramène, ni vu, ni connu ! hurla Steven, prêt à sortir son portefeuille de la poche arrière de son pantalon en lin, qui lui semblait tout d’un coup étriqué.
— Vraiment monsieur, je suis bien désolé pour vous mais il va peut-être falloir reporter votre réunion…
— Vous n’y pensez pas ! C’est la fin de ma carrière assurée ! Dix mois qu’on est sur le dossier !
— Eh bien, allez à cette réunion sans ombre… Après tout, qui le remarquera ? Pour voir, il faut avoir la volonté d’ouvrir ses yeux, assura l’agent, toujours avec ce même calme qui commençait sincèrement à lui courir sur le haricot.
— Quoi… Qu’est-ce que ? Vous vous prenez pour Matthieu Ricard maintenant ? La blague… ça se voit que vous n’avez jamais assisté à de grandes réunions pour dire de pareilles conneries !
— Non c’est vrai, je ne suis que le gardien d’ombre. Je ne sais pas ce que c’est que de participer à de « grandes » réunions.
— Je rêve ou vous venez de placer des guillemets autour du mot « grandes » ?
— Rêver éveillé n’est-il pas le pire des cauchemars pour celui qui souhaite agir ? murmura le gardien d’ombres, comme pour lui-même.
— Bon, arrêtons ce cirque grotesque, voilà 1500 balles, je vous le dépose, là maintenant, en cash, ça restera entre nous, filez-moi une ombre, n’importe laquelle, qu’on en finisse ! s’écria Steven en brandissant son portefeuille.
— Monsieur, vous pourriez déposer 1 000 000 d’euros sur le comptoir que cela ne changerait rien, ces ombres ne sont pas à vendre ni à louer. Il n’y a pas plus sourd que celui qui refuse d’entendre.
— Je veux une PUTAIN D’OMBRE! J’EXIGE UNE PUTAIN D’OMBRE ! DONNEZ-LA MOI !!! hurla Steven en balançant un billet de 500 euros sur le comptoir.
— Votre ombre n’est pas encore arrivée, vous avez de la chance, profitez plutôt de ce temps qu’il vous reste pour vivre…
— Que dites-vous ?
— Que vous devriez profiter de ce répit qu’il est vous est donné dans cette vie. Elle est précieuse.
— Quoi ? Ce sont des menaces ?
— Du tout. Le peureux voit la peur à toute heure.
— Appelez-moi tout de suite votre responsable !
— Vous ne comprenez pas, vous êtes aussi aveugle qu’un crapaud en plein soleil. Il n’y a pas de responsable. Il n’y a que vous. Et moi. Le gardien des ombres. Des ombres des défunts.
— Des défunts ?
— De tous ceux qui sont morts, si vous préférez.
— Quoi… qu’est-ce que… je n’y comprends rien !
— Je ne vous demande pas de croire à cette histoire. Est-ce que j’y crois moi ? Il y a eu une erreur dans notre registre. Votre ombre n’est pas là. Donc, techniquement, votre heure n’est pas venue. C’est ce qui s’appelle avoir l’ombre d’une chance. Comprenez-vous maintenant, VOUS POUVEZ PASSER DE L’OMBRE à LA LUMIèRE !
***
— Steven, ça va ? Putain, donnez-lui de l’eau vite ! Putain, mais Steven, ça va pas de rester au soleil comme ça ? Il fait au moins 40° à l’ombre ! Tu vas pas nous faire un malaise alors qu’on est à deux doigts de conclure le coup du siècle ?
Steven tourna la tête vers son acolyte, dont le sourire étincelait sous le soleil de Dubaï.
Steven se retourna subitement et aperçut son ombre. Il soupira, soulagé : cette chaleur, il ne s’y habituerait jamais. Voilà qu’il se mettait à…
Il poussa un cri d’effroi. Sous ses yeux, son ombre se transformait en une forme qui ne laissait aucun doute… la pointe acérée d’une… faucheuse ! Steven regarda son collègue, son ombre qui ondulait, une danse saccadée.
Il laissa tomber son porte-document, qui contenait le dossier qui lui assurerait une sacrée sécurité financière… et se mit à courir.
— Qu’est-ce que tu fous Steven ? hurla son collègue derrière lui, abasourdi par la scène à laquelle il était en train d’assister : son partenaire, le plus talentueux de la boîte, courant comme un forcené dans la foule d’influenceurs et autres financiers, ricanant et criant à tue-tête « JE SUIS LUCKY LUKE ET JE ME TIRE PLUS VITE QUE MON OMBRE !!! ELLE NE M’AURA PAAAAAAAAAAAAS !!!! »
Alors, que pensez-vous de cet agenda ? Pour ne rien manquer, c’est ici !
Très chouette ! Surprenante, cette ombre-ci sort des sentiers battus . Rêvons : face à la faucheuse, serait Lucky qui veut, à condition d’avoir un bon coup de crayon 🙂
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Merci beaucoup !!! Bien sûr, osons rêver, même si le risque, c’est que ce nouveau texte « crayonné » fasse de l’ombre à celui-ci 😉 ! Je m’en vais découvrir de ce pas les trouvailles de tout le monde. Belle journée, Sabrina.
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Belle histoire, bien menée.
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Merci beaucoup ! Cela faisait si longtemps que je n’avais pas participé dans le bon timing, que je suis juste ravie d’avoir pu respecter les délais ;). Belle journée, Sabrina.
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J’ai bien aimé cette première chute « L’ombre d’une chance » quand à la finale, être plus rapide que lucky luke pour échappé à la faucheuse, alors ça c’est drôle, et bien en phase pour un agenda ironique.
PS/ si tu pouvais m’indiquer comment sortir de ELS pour mon blog ce serait salvateur.
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Merci Mijo pour tes repérages et ta lecture ! Eh, eh évidemment, ce genre de détails ne t’échappe pas ! Je t’envoie un MP pour ELS, j’avoue que j’avais pas mal bataillé de mon côté ! Belle journée à toi, Sabrina.
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Très drôle ! j’aime beaucoup le franglais, et les proverbes du gardien des ombres.
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Merci beaucoup Victor Hugotte ! Pour ton passage et ton retour ! Je ne suis pas certaine d’avoir lu ton texte, tu participes aussi ce mois-ci ? Belle journée à toi ! Sabrina.
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Oui oui! j’ai participé ! Au fait, Mes félicitations pour ton blog qui est très bien organisé.
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Bien indulgente pour ce specimen humain, dont les réflexes montrent bien qu’à l’ombre il mériterait d’aller, plutot que disparaitre simplement
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Complètement, je lui souhaite de courir loin très loin, ou de revenir à la raison et de retrouver la lumière de l’humanité… Merci pour le passage ici ! Belle journée, Sabrina.
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Je bisse mijo pour « l’ombre d’une chance » et le prophétique verbiage de l’agent (de larmes et des sombres ?). Du coup, je file rattraper la mienne qui, à ta lecture, a décidé de filer… à l’anglaise, off curse !
Bien joué, Sabrina.
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Merci, j’aime beaucoup ta formulation :). J’espère que tu as retrouvé ton ombre, enfin, pas trop tôt non plus ! Belle soirée, Sabrina.
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Bien enlevée cette ombre et la référence à Lucky Luke est savoureuse. J’ai beaucoup aimé ce texte moins léger qu’il y parraît…
Bonne soirée.
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Merci beaucoup pour le compliment, oui il ne faut pas se fier aux apparences, l’humour permet de titiller la réalité 😉
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Bon jour Sabrina,
Un dialogue enlevé à l’ombre d’une page à lumière du lecteur en cette diaphonie les propos s’échelonnent au cordeau sur le fil de l’Ankou qui n’est pas fauchée d’anecdotes à revendre … 🙂
Bref, un texte comme j’aime les lire. Superbe.
Bonne journée à toi.
Max-Louis
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Merci Iotop, cela me touche beaucoup ! Tu sais que j’essaie de tout faire pour trouver une régularité dans les écrits et la frustration parfois est d’écrire trop vite ou vide 😉 ! Belle soirée à toi
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Drôle et vivant, j’adore ce dialogue !
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Hé, hé, merci beaucoup ! Beau dimanche à toi, Sabrina.
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