Apprentie en herbe #14 ou le syndrome de l’imposteur

Bonsoir bonsoir, un article que je voulais sortir depuis longtemps, et quand j’ai vu ce matin la publication de Léa Herbreteau, une auteure que j’aime suivre (dans le sens non psychopathe du terme s’entend), je me suis dit que le hasard faisait tellement bien les choses que c’était le bon moment de sortir un nouveau numéro de mon Apprentie en herbe ! Pas de spoiler, pas de teaser ou autre terme anglais qui ferait frémir les curistes et les puristes, qu’est-ce donc ce que ce syndrome de l’imposteur (impostrice ? imposteuse ? imposteure ? Aucun féminin … intéressant !).

Pour faire simple, et ne pas verser dans la philosophie de comptoir avec Bébert aux manettes (passons sur le cliché, là n’est pas la question), le syndrome de l’imposteur en écriture, c’est le fait de ne jamais se sentir légitime, de ne pas penser que son « art » finalement vaille la peine qu’on s’y intéresse, encore moins qu’on s’y attarde (voyez, les guillemets autour du mot « art », typiquement c’est ça).

Voilà, fin de l’article. C’est ce qu’on appelle clarté et concision. 🙂

Alors, en psychologie, ça peut aller très loin, c’est la sensation d’être une grosse arnaque, une arnaque qui ne manquera pas d’être révélée au grand jour : dépréciations, incertitudes, auto-sabotages, blocages… et la liste de ces joyeusetés est longue, mais avant que vous ne me bookiez un rendez-vous chez une charmante personne qui possède un fauteuil confortable où l’on déroule ses misères que ladite charmante personne ponctue de « hum hum » songeurs (passons le cliché, là n’est pas la question), je n’en suis pas là ! Parce que ça ne me touche absolument pas pendant la phase d’écriture ou réécriture et donc ça ne me bloque pas personnellement pour continuer à « créer » (satanés guillemets encore ! Tu sais, je connais une charmante personne avec un confortable fauteuil…) mais c’est plutôt gênant dans la phase d’après…

D’après = parution / publication / édition / autoédition. Et là, c’est plus pénible, pour ne pas dire un mot certes plus court mais moins classe. Parce qu’on ne va pas se mentir, si j’ai quand même proposé mes livres dans des maisons d’édition, et si je me suis embarquée dans le merveilleux voyage de l’autoédition, c’est quand même pour être lue par d’autres lecteurs que ma tante et mon chat analphabète (merci tatie !!!).

Alors concrètement, qu’est-ce qui se passe dans ton syndrome de l’inspecteur je ne sais quoi ?

Quand on se lance solo, comme Han, dans cette aventure éditoriale, il faut par essence tout faire seul de A à Z, genre même les lettres relou Y et W. Bref, si ma métaphore alphabétique n’est pas limpide : c’est à toi de vendre ton livre, et donc, de te vendre TOI. Et c’est là que ça peut coincer… Et ça donne des situations un peu grotesques :

¤ Tu évites de parler du livre tout simplement, même à tes super copines, en assumant qu’elles savent forcément que tu as sorti ton livre et donc que si elles ne t’en parlent pas, c’est que, ben, en fait c’est que ça ne les intéresse pas, donc on ne va pas les embêter… Et au bout de 6 mois, c’est l’incompréhension quand elles te disent, mais t’as sorti ton recueil ! Pourquoi tu ne me l’as pas dit ??! (Ben euh, je croyais que… ACCORD TOLTEQUE : AUCUNE SUPPOSITION TU NE FERAS).

¤ Quand on vient te parler directement du livre en question, tu te sens fort bête, du coup, tu fais des phrases genre « ah oui, ça… c’est gentil… Tu sais où sont les apericubes ? » (Les apericubes, c’est mal à 36 niveaux, mais là n’est pas la question). (ACCORD BIBLIQUE : PARLER DE TON RECUEIL, TU ASSUMERAS) (Oui, c’est tout à fait ce que dirait Dieu).

¤ Quand on te dit qu’un jour tu seras la future J.K Rowling, c’est sûr (propos rapportés un soir bien trop arrosé par une personne de ton entourage un peu trop proche), tu ris et tu réponds des phrases comme « oh, je m’amuse, c’est pour le plaisir ». (ACCORD D’HéON : DéPRéCIER TON PROPRE TRAVAIL, TU CESSERAS). Parce que pour s’amuser, il y a plein d’activités possibles qui n’impliquent pas de réécrire 10 fois une nouvelle, comme faire un scrabble ou un sudoku (oui, je sais ce que c’est le fun).

¤ Quand tu dois faire ton auto-promotion, demander des chroniqueurs pour un service presse, collecter des critiques, écouler ton stock, tu le fais dans un envoi groupé totalement à l’emporte-pièce (alors, que tu rates tous tes gâteaux Alsa), en espérant que tous tes contacts vont lire-le-post-le-liker-le-partager-acheter-ton-bouquin-le-lire-l’offrir-à-tous-ses-collègues-de-bureau-écrire-une-critique-dithyrambique-sur-tous-les-sites-de-vente alors que tu n’as toujours pas compris que FB fonctionne sur des algorithmes qui font que les 3/4 de tes contacts ne voient pas la publication et que du coup, ils sont autant au courant de la venue de ton recueil sur cette terre que de la dernière fois où tu as mangé des lentilles (avant-hier) (ACCORD BIBLIOTEK : CLAIREMENT TES DEMANDES TU FORMULERAS).

¤ Quand on te donne plein de pistes pour développer ta « visibilité » (ce recours aux guillemets nous rend tout sauf guillerets), tu les trouves toutes géniales : proposer le livre dans les épiceries du coin, contacter les journaux locaux, se présenter dans ta libraire préférée, s’inviter dans un salon du livre… Tu t’exclames, tu t’excites, tu t’exaltes !!! MAIS OUI C’EST çA ! Et tu t’exécutes… pas… Et ça se transforme en : ça…. c’est… oui ! mais… (LES LIBRAIRES, LES BIBLIOTHécAIRES ET AUTRES APOTHICAIRES DU LIVRE TU EMMERDERAS).

¤ En fait, pour éviter qu’on croie que tu te la pètes, qu’on te colle cette put*** d’étiquette, pour s’assurer que tu gardes les pieds vissés sur ta planète, et sur tes épaules ta tête, tu ranges ta joie sous le tapis avec les miettes, tu changes de sujet en une pirouette et pis tes écrits deviennent des « historiettes »…

Alors, évidemment, savoir si je suis la nouvelle J.K Rowling (ni si j’ai le quatre-quarts de la moitié de son talent) n’est pas la question (Long is the road, comme dirait l’illustre Jean-Jacques Goldman), mais je trouve la formule de Léa « avoir peur de réussir » fort intéressante et très révélatrice.

Parce que je suis pas du genre à rester douillette dans une zone de confort (sauf le matin, avec une couette et un thé, mais on ne voit pas le rapport), parce que je suis habituée à tout chambouler, à foncer et réfléchir après. (J’écris de la même manière. Je pars et on verra où j’arrive, si j’arrive). Et pourtant, quand il s’agit de la promotion de mes livres, me voilà aussi dégourdie qu’une pintade dans un congélateur. Quand je me transforme pas en Sainte-Bernadette à croire aux miracles du Saint-Editeur qui passerait par mon blog et qui serait foudroyé sur place par tant de génie dans la plume de la pintade en question.

Parce que je sais pas si j’ai peur d’échouer ou plutôt de réussir. Parce qu’en vrai, je me suis jamais laissé penser que ça pourrait marcher. Pour de vrai. Parce que ça rassure, de se dire que c’est pas un but en soi, et ça permet d’essuyer le sujet d’un geste, d’avoir à se justifier. Auprès de ses proches, auprès de soi-même.

Parce que de le prendre avec humour est toujours plus facile que de le prendre au sérieux, mais à force de faire croire que c’est une bonne vieille blague, ce « truc d’écriture », on le prend comme une blague, alors que c’est important pour soi. CQFD.

Parce qu’il va falloir que je commence à assumer que j’écris. Oui. Et que je poste ce texte…

Sans me la « péter », sans ces guillemets.

PS : Bonjour, je m’appelle Sabrina, je suis Auteure Anonyme. Bonjour Sabrina. Voici mon livre, sorti l’année dernière. Bravo Sabrina, vous avez fait le plus dur. (Hum…)

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6 réflexions sur “Apprentie en herbe #14 ou le syndrome de l’imposteur

  1. Salut Sabrina !
    C’est toujours avec cette touche d’humour que tu t’approche du vrai… même si pour cette fois, il s’agit moins d’une nouvelle mais plutôt d’un exercice quasi-cathartique.
    Je suis assez ennuyé pour laisser des commentaires (ce que je me force à faire car en fin de compte tu le mérites).
    Pour te donner une image :
    Un ami m’invite chez lui pour dîner… Je sais qu’il va y mettre du sien pour que je passes un bon moment… apéro (avec ou sans apéricube, au choix), musique de fond, canapé confortable, déco de table, housses de chaise, match de curling, entrée-plat-trou normand-fromage-dessert-digestif (car oui, il sait recevoir ! Il a étudié à fond le guide d’Un Diner Presque Pas Fait)…
    Bref, je passe un bon moment… Je me vois mal lui dire que son canapé bouloche, que la Makaréna c’était sympa… avant, que j’ai eu peur quand il m’a fait flamber un apéricube au Grand Marnier, que les toasts camembert-Ketchup c’est une association intéressante…
    En fait je dis juste

    Je suis mal placé pour écrire des commentaires autres que dithyrambiques car :
    – Je fais ce que je veux,
    – Tu le mérites
    – Je suis fan de l’auteure et donc absolument et résolument pas objectif
    – J’ai un respect immense pour celles et ceux qui on le courage (et parfois l’outrecuidance) de partager leurs visions du monde et de confronter le tout aux regards des Autres.
    – J’érige des autels pour ceux qui le font avec modestie, humour et poésie.
    – Je loue les gens dotés d’imaginations capables de concevoir des mondes ou des angles de vue qui me surprennent et me font voyager.
    En somme, tu n’as pas le talent de J.K Rowling… and so what ?! Tu as le tien et charge à toi de le faire prospérer…

    Je conclurais sur 2 points avant de te la(i)sser :
    – Anecdote véridique qui m’a aidé dans beaucoup de chose :
    Je rencontre un jeune homme dans un bar juste en dessous de chez moi et on entame la conversation…On le nommera Fabien, car de mémoire c’est comme ça qu’il s’appelait et du reste cela n’a aucun intérêt pour la suite mais par souci du détail rendons à JuL…. Bref, passons.. Comme 2 jeunes hommes avinés que nous étions, au fil de la conversation…le compagnon de canon en question me dit :

    Je lui ai répondu un truc du genre : (à mon avis, avec du recul ça devait être plutôt : )
    Et lui de répondre :
    Bien qu’ayant conservé son numéro sur un dessous de verre Grimbergen taché d’alcool et puant la cacahuète, la bière rance et les mains sales… je n’ai jamais repris contact et donc je n’ai pas la fin de l’histoire… tout ça pour dire que la seule étiquette que tu portes c’est celles que tu acceptes de porter… et des fois ne pas se prendre trop sérieusement au sérieux facilite grandement les choses…

    – Notre cerveau et celui des autres est bourré….(des fois)… de biais (tout le temps)…
    Il arrive que nous ayons une vision déformée de notre travail ou de l’image que l’on en a ou qui pourrais en être perçue.
    Je t’invite à te renseigner sur la façon dont nous fonctionnons (ou pensons fonctionner) et c’est fascinant (biais cognitifs [des dizaines], compétences non techniques…) et surtout (si ce n’est déjà fait) à lire ce petit bijou : PETIT TRAITE DE MANIPULATION A L’USAGE DES HONNÊTES GENS (étudié à l’ex-ENA par nos chers politiques… si,si!). Afin d’acquérir les outils infaillibles ou presque dans le but de déclencher des actes d’achats compulsifs, des coups de mains providentiels et de provoquer un peu le destin.

    En espérant n’avoir pas été trop long…
    En un mot comme en 100, merci encore pour tes créations !
    Amitiés

    Ps : J’ai fait flocker pour toute ma famille et moi des t-shirts « Belzébuth forever »… je comprend pas… ça n’est pas bien passé… Je suis entourés de gens qui ne savent pas apprécier l’Art… c’est un fléau !

    Aimé par 1 personne

    1. Coucou J-B !

      Ben dis donc ! Si j’avais su que ma publication (que je n’étais pas sûre de vouloir publier parce qu’elle est assez personnelle et non exhaustive…) allait recueillir un si beau commentaire !! Franchement, MERCI ! Pour tes mots, ton anecdote et ton soutien (même si non objectif, m’en fiche, je prends quand même).

      Pour dire cependant, tu es tout à fait légitime pour dire ce que tu penses d’un texte, même si c’est négatif car c’est aussi ainsi que l’on s’améliore de l’autre côté de la plume !

      Je ne sais pas si tu as déjà songé à écrire toi-même de ton côté, mais je t’invite à le faire joyeusement car pour le coup, c’est très agréable à lire (je parle de forme et non de fond, car après on va me rétorquer que c’était pas très très objectif tout ceci, va dire après un tel commentaire, de méchantes choses gnagnagna!).

      Hâte de voir les T-shirts :), et de lire le petit traité de la manipulation, je ne connais pas ce titre, mais je m’intéresse depuis un petit moment à la métacognition et aux biais cognitifs notamment, le cerveau est assez incroyable, je trouve ça passionnant (la déconstruction des croyances, qu’elles soient religieuses ou non) ! Bref, merci encore pour l’effort fourni pour poser les mots ici, et pour tout ce qui a été joliment dit !

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  2. Hello Sabrina, dur est l’ascension vers la notoriété …littéraire 🙂 Quoiqu’il en soit, être toi suffit, tu fédères par ton style, ton humour et ton authenticité. Vouloir être comme untel ou unetelle, est vain, nous ne serions que de pâles copies.
    Suggestions Mijotelk
    *La pratique régulière tu maintiendras
    *La variété de sujets, de points de vue , de style tu adopteras
    *L’écriture volante ( entendre de blog en blog, sur tous supports digitaux ou feuille de choux) tu pratiqueras
    *Jamais l’humour et lucidité tu ne perdras
    A bientôt dans les vitrines des librairies 🙂

    Aimé par 1 personne

    1. Oh Mijo ! Tu m’as fait tellement rire ! MERCI du fond du cœur pour ton soutien, ton humour, tes mots, bref, rien que pour des messages comme ça, on ne regrette pas de se lancer dans l’inconnu ! Je vais continuer à essayer d’être moi, c’est déjà un gros chantier ahah, et à me challenger sur les blogs interposés et sur les futurs projets, dussent-ils conquérir le monde ou quelques lecteurs ;). On se voit dans la vitrine, je serai à gauche, tout près de la porte d’entrée ah ah ! Belle journée à toi !

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