Jeux Olympiens (naissance d’un mythe)

Bonjour bonjour ! L’été continue avec aujourd’hui un nouveau texte, inspiré de certains événements récents, que je te laisse deviner ! Comme le texte est plus long qu’à l’accoutumée, disons plus long que depuis quelques semaines, je vais aller très vite dans mon introduction ! En résumé, si t’aimes la mythologie, et un peu moins les mythos, l’amour et l’humour, ce texte est pour toi ! Pour le reste, un Apprentie en herbe à venir la semaine prochaine autour de l’autoédition pour mieux expliquer la sortie de mon recueil ! Belle lecture et n’hésite pas à faire ton Hermès et me laisser un petit message 😉 !

Au mont de l’Olympe se tenait tous les ans un grand banquet que les Dieux, par goût des mondanités ou par ennui, avaient décidé d’instaurer, en invitant à la tablée légendaire les Dieux les plus célestes (et les plus funestes). C’est ainsi que pendant ces Olympiades, il n’était pas étonnant d’y croiser Asclépios, Dieu de la médecine, en pleine discussion avec Hermès, Dieu du commerce, d’y voir Artémis, Déesse de la chasse, discutailler avec Pan, Dieu de la nature, d’y observer s’encanailler Géras, Dieu de la vieillesse, avec Hébé, Déesse de la jeunesse ou encore d’y remarquer Demeter,  Déesse de la moisson, s’enjailler avec Dionysos, Dieu de la boisson.

Alors qu’Hypnos, déesse du sommeil, s’endormait à table et qu’Apollon, Dieu du chant, entonnait un énième refrain à la gloire d’Aliagas, Dieu de l’animation et des nuits, Dolos, Dieu de la duperie, décida de jouer un petit tour à Philotès, Dieu de l’amour « charnel » (pour ne pas dire autre chose) qui se faisait mousser (il avait cinq verres d’Olympios dans le cornet), avec la liste de toutes et tous les partenaires qu’il avait satisfaits et ce, en une seule année. Dolos, en couple depuis tant d’années avec sa bien-aimée Apaté, en avait soupé de toutes ses vantardises qui lui laissaient, sans qu’il en ait jamais pu trouver la raison, un goût salé en bouche. Il approcha Momos qui semblait froidement bassiné par sa discussion avec Athéna, Déesse de la raison. Ne l’avait-on point convié à une fête !? songeait celui-ci.

L’idée de Dolos plut à Momos, et aussitôt, le nom de la deuxième victime lui vint en tête… En bon Dieu du sarcasme, il souffla le nom de Héra, Déesse du mariage légitime… Ricanant, Dolos alla trouver Philotès et lui lança un pari fou : réussir à séduire Héra cette déesse si éprise de la vertu du foyer marital qu’elle n’avait jamais réussi à tomber amoureuse… ni à en créer un ! Puisqu’il savait si bien tomber les femmes, pourrait-il faire vaciller celle-ci ? S’il réussissait, alors Dolos le laisserait coucher avec Apaté, sa propre femme qu’il savait être convoitée par ce vantard, pour ne pas dire autre chose. Philotès n’eut pas à réfléchir à deux fois. Voyant à l’autre bout de la table la gorge déployée d’Apaté qui riait aux éclats, son désir ressurgit. Héra la prude, il attraperait et Apaté la sauvage, il se ferait ! Il but cul sec un sixième verre d’Olympios.

Et s’il échouait ? pensa-t-il à demander dans un surprenant éclair de lucidité. Alors il devrait offrir à Dolos une nuit avec Séléné, Déesse de la lune, une ex de Philotès que Dolos avait toujours rêvé de posséder pleinement. Philotès accepta. Séléné n’était qu’une traînée et Dolos serait fort déçu de découvrir en vérité qu’au lit, elle était très loin de vous la faire décrocher, la lune.

Philotès avait beau ne pas être connu pour son intelligence, il n’en restait pas moins un prédateur charnel, pour ne pas dire autre chose, et en bon prédateur, il savait exactement comment faire mouche, même face à une déesse farouche. En un claquement de doigts, il se déguisa et se grima le visage. Lâchant ses cheveux longs, il était méconnaissable. Ainsi maquillé, il se ferait passer pour Blankos, Dieu du stade… Si Dolos et Momos rirent en le découvrant ainsi affublé, leur sourire s’effaça bien vite, quand horrifiés, ils aperçurent Héra repartir une heure plus tard, au bras de Blankos — pardon Philotès, sa chevelure cascadant sur ses épaules fièrement dressées par le défi relevé !

C’est qu’ils ne savaient pas qu’Héra, lassée de s’occuper des enfants des autres et de n’enfanter jamais, s’était mis en tête d’un jour très proche, céder son corps à un homme qui lui semblerait d’une assez bonne étoffe pour emmaillotter son futur poupon du drap de la vitalité. Et lorsqu’elle vit ce Dieu Blankos, célibataire, si bien bâti, (si beau parleur), elle se laissa succomber aussitôt. La nuit fut fertile, au grand dam de Dolos, Momos et Philotès. Le premier, parce qu’il ne savait pas comment prendre Apaté en aparté pour parler de ce pacte passé. Le second, parce qu’il regrettait de ne pas avoir poursuivi sa discussion rasoir auprès d’Athéna. Ne valait-il pas mieux s’ennuyer que s’attirer des ennuis ? Le dernier parce qu’il avait oublié dans l’ivresse de la nuit que Héra était avant tout la déesse de la… fécondité !  

Quand l’enfant naquit, le lendemain de l’accouplement, le mont Olympe trembla ! Des vases se fêlèrent chez Dolos et Apaté. Comment ce mufle avait-il pu la promettre à Philotès ? Des gifles volèrent. Comment Momos avait-il pu participer à tel projet ? Des baffes se perdirent. Comment Philotès avait-il pu ainsi mentir à Héra ? Des injures fendirent l’air. Blankos, enfin, Philotès, se fit mettre à la porte et la déesse du mariage, bafouée, jura de se venger. Elle se précipita chez sa meilleure amie Némésis, en lui confiant son histoire et son bébé, qu’elle appela ironiquement ou non : Bezos.

Hélas pour Héra, n’y-a-t-il pire meilleure amie que celle prétendant s’affecter d’une nouvelle tout en s’en réjouissant en son for intérieur ? Némésis avait en effet toujours admiré – certains diraient envié – la vertu dont se couvrait Héra depuis toutes ces années. Et de la voir si facilement fourvoyée par ce Philotès dont on se souvenait si peu des performances intellectuelles, Némésis eut du mal à cacher sa gaieté face à l’incongruité de la situation. Mais, devant le regard implorant d’Héra, la Déesse de la vengeance se rappela son amitié, et fomenta un plan pour punir les trois compères et la sortir de ce pétrin olympien.

Elle décida d’épargner Dolos, dont la bêtise avait déjà œuvré contre lui-même. En effet, Apaté, épatée au matin par les confessions de son compagnon, qui dépassaient largement son seuil de compréhension, le vira manu militari de leur maison, éparpillant sur la place publique, toutes ses chaussettes et ses caleçons.

Quant à Philotès, quand il vint récupérer son dû chez Apaté, celle-ci l’attendit sagement, ce Dieu de la fanfaronnade. Némésis était passée la voir entre la scène des caleçons (de Dolos) et la deuxième scène de caleçons (à venir). Elle savait qu’elle ne craignait rien… Némésis avait ôté la toute-puissance de Philotès ! Philotès, nu comme un ver, mou comme une limace ne sut plus que faire ! Seul avec sa cervelle, il perdit quelque peu pied, et s’enfuit en courant devant cet affront. On ne le revit plus au mont Olympe.

Ne restait qu’à trouver un père (pour Bezos) et un partenaire (pour Héra) de substitution. Némésis ne chercha pas bien loin, et se dit que Momos ferait très bien l’affaire ! Momos – quelle ironie, la vie ne tenait qu’à un fil (d’Athéna ?) – se retrouva donc du jour au lendemain père et au foyer ! La vie sur le mont Olympe put reprendre son cours…

Momos essaya tant bien que mal de jouer son rôle ; malheureusement Héra, tout en lui restant reconnaissante de la sauver de l’opprobre, n’avait d’yeux (dieu ?) que pour son fils Bezos qui grandissait de jour en jour. Les Dieux autour de lui disaient qu’il accomplirait de grands exploits, certains le voyaient dompter les géantes Amazones, d’autres l’imaginaient encore conquérir les cieux et découvrir ce qui se cachait derrière, tout au loin bien après les nuages… Bezos montrait des capacités hors du commun des Dieux, tout lui semblait facile : porté par l’amour inconditionnel de sa mère, Bezos se sentait pousser des ailes de Pégase. Cependant, bien vite, les Dieux s’aperçurent que rien n’était suffisant pour combler ce Dieu vorace. Certains essayèrent de prévenir Héra, il fallait étoffer un peu les ambitions de Bezos, car malheur allait en découler. Héra écartait ces avertissements d’un rire, les Dieux étaient tous jaloux de son surdieué. Momos, qui voulait l’aimer comme son propre fils, avouait craindre ce Dieu qui grossissait d’orgueil, et n’osait le contrecarrer, de peur du fantôme de Philotès qui pourrait surgir à tout instant pour révéler l’odieuse vérité…

Un jour tout à fait banal sur le Mont Olympe, le drame tant redouté arriva. Bezos tomba amoureux de la promise du Dieu Pan, Alexa, une demi-déesse qui veillait sur les hommes. Bezos n’étant pas habitué à ce que l’objet de son désir lui soit refusé, il s’acharna tant et si bien qu’il réussit à voler Alexa. La colère de Pan, touché en plein cœur, fut terrible. Sans fléchir ni réfléchir, il renvoya sa promise sur terre où personne ne pourrait plus l’y trouver et la rendit mortelle. Puisque Alexa n’avait pu résister à ce Bezos narcissique, elle serait condamnée à vivre parmi les humains et à connaître les pires tragédies. Et si d’aventure, Bezos tentait de retrouver sa protégée, des catastrophes, il déclencherait ! Transi d’amour, empli d’ego, Bezos fit peu de cas de ces menaces. Personne ne lui commanderait sa conduite ! Bezos parcourut  la distance qui le séparait d’Alexa en un rien de temps et survola tous les continents pour la retrouver. La réponse de Pan fusa aussitôt. Il déchaîna les mers, brûla les forêts, créa des tsunamis. Ce fut un jour terrible pour les humains, qui le surnommèrent le vendredi noir.

Héra, soutenue par Athéna, essaya de rendre la raison au Dieu de la nature. Bezos n’était au fond qu’un grand enfant, naïf et fougueux. Sa colère avait bien assez duré, le pardon devait triompher ! Pan ne céda pas, même devant Némésis qui trouvait elle aussi que l’amour, un sentiment surfait, n’excusait pas tout. Héra parvint à faire envoyer par Iris dans un colis divin un message d’alerte à Bézos : Pan continuerait à s’acharner sur l’humanité tout entière, on lui avait toujours dit avec Momos de ne pas jouer avec la nature, il fallait qu’il se mette à l’abri, qu’il lui revienne à elle, à eux, sur le Mont Olympe !

Quand Bézos lut la missive, son amour pour Alexa et son amour-propre en prirent un coup. Devenu mortel, il lui fallait maintenant inventer un moyen d’atteindre le Mont Olympe où les Dieux prendraient à nouveau soin de lui. Il bricola en un rien de temps une capsule capable de percer les nuages, une invention prodigieuse, selon ses propres termes, qu’il décida de baptiser Blooriginis. Malheureusement, dans l’urgence, il n’avait prévu qu’une seule place dans l’engin. Il se promit de revenir chercher Alexa quand tout serait calmé, et que Pan arrêterait ses caprices. C’est ainsi que le samedi suivant le vendredi noir, les humains virent décoller un étrange objet volant qui semblait viser les clouds au-dessus de leurs têtes. Un jour passa, puis deux.

Comme son père Philotès des années auparavant, on ne le revit plus jamais sur le Mont Olympe. Certains diraient, au traditionnel banquet, qu’il était coincé avec sa peine dans cet espace où les Dieux n’avaient jamais pu aller, et qu’ils imaginaient noir et vide.

Alors, tu en penses quoi de mes mythologies 🙂 Pour continuer à me lire, c’est là !

Mon recueil toujours en vente ici

Crédit photo par Darkmoon_Art de Pixabay

2 réflexions sur “Jeux Olympiens (naissance d’un mythe)

  1. Bon jour Sabrina,
    Excellent (comme toujours) 🙂
    Cette « …Alexa n’avait pu résister à ce Bezos narcissique » …. ce « croisement » entre la mythologie et la réalité, c’est fabuleux aussi bien dans la narration humoristique et didactique qu’au développement qui nous fait découvrir un « monde » de Dieux qui s’il avait été appris ainsi nous aurions eu un savoir qui aurait laissé trace dans nos mémoires … 🙂
    Bonne soirée.
    Max-Louis

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    1. Bon jour bon jour ! Merci beaucoup pour cette volée de compliments ! J’avoue m’être beaucoup amusée à écrire, et à me replonger dans la mythologie (la vraie de vraie). Heureuse que cela t’ait plu, les vacances ont du bon, on renoue avec le temps de l’écriture ! Belle journée à toi, Sabrina.

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