Plage de rêve (Agenda Ironique août 2020)





Hello, hello, c’est dimanche, et je suis encore en semi-vacances (parce qu’en vrai, je suis déjà en train de penser à ma rentrée qui approche à grands pas de loup). J’en profite pour rappeler à tous les vacanciers ou non, auteurs confirmés ou non, amoureux des mots ou non si, que vous avez encore une belle semaine pour vous essayer à ma première consigne d’écriture de ma nouvelle catégorie à vos styl’oh ! (je remercie déjà ceux qui ont proposé leur texte, ils pourront vous dire que je ne mords pas). Pour l’heure, me revoilà avec une nouvelle participation à l’Agenda Ironique, (je vous en ai parlé il y a longtemps ICI et ), qui est hébergé chez IOTOP. Pour le joli mois d’août, il fallait évoquer la plage (n’importe laquelle, vous verrez celle que j’ai choisie), incorporer des mots qui y font sacrément penser comme MONOÏ / ARGILE / FLOT / PERCHE ( et on pouvait les transformer itou itou, je me suis d’ailleurs amusée à en détourner un, car oui argile, ça peut former un glaire). Cessons de bavasser, et partons rêvasser !

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—  Putain, mais t’en as trop mis là ! T’es sérieuse ? s’écrie Zora en regardant avec horreur son amie. 

— Ben quoi, tu m’as dit qu’il fallait se protéger la face, alors je me protège ! proteste Cléa, les mains si poisseuses qu’elle doit s’essuyer à un bout de t-shirt qui dépasse de son sac. 

— Non, mais là, avec la crème que t’as foutu sur la tronche, tu peux te faire un croissant meuf ! 

— Ouais, ben moi, j’ai pas ta peau, j’te signale, je me fous au soleil, c’est mort, je crame sans passer par la case départ ! J’suis une putain d’écrevisse, prête à m’étaler sur les stands à côté des moules et des huit ch’ais pas quoi !

— T’es gravos ma parole ! C’est pas des chiffres qu’ils vendent, c’est des HUÎ-TRES ! corrige Zora en pouffant de rire.

—  Oh ça va, on est pas tous « culturés » comme toi ! Toute façon, c’est trop chelou ces trucs, t’as vu on dirait un mollard de ouf ! 

—  ‘tain, mais faut tout lui apprendre à celle-là ! C’est le summum du raffiné, les adultes, ils adorent, ils kiffent, ils bavent rien qu’à penser à ce glaire qui dégouline dans leur gosier… 

— Ouais, ben mon bro, il t’en fait direct des mollards comme ça, sans chichis, sans rien, en direct du producteur et tout et tout… rétorque Cléa, qui ne comprend visiblement pas les subtilités gastronomiques.

— Elle est guedin c’te meuf ! Vas-y, t’as pas d’autres sujets de discussion que la morve de ton frangin franchement ? reprend Zora avec une mine de dégoût.

— C’est toi qui fais ta dame, genre tu bouffes des huîtres, alors que dès que t’as des morceaux dans ton yaourt, tu dégueules à moitié !

— Non, mais, tu joues pas dans la même cour là, les huîtres, c’est les embruns, la mer, les algues, l’iode, c’est tout un mélange de saveurs, alors que tes yaourts, c’est clairement le mec à la tête du yaourt qu’a merdé ! Faut choisir les gars, soit t’es liquide, soit t’es solide, mec, t’es pas entre les deux quoi, la vie, elle fait pas de cadeau aux indécis bordel !

— Grave ! Teh, file-moi une clope d’ailleurs, j’en ai plus !  réclame Cléa en ne trouvant pas les siennes dans son sac.

— Je croyais que t’avais arrêté ? 

— Oh, t’es pas ma mère ! C’est les vacances ! J’arrête en septembre, juillet, t’as pas pire pour arrêter de fumer !

— Ouais, t’as raison, en plus avec le soleil qu’il fait, tu vas même pas avoir besoin de briquet, elle va se transformer en Salamèche ta tige…

— Comment tu m’as tuée !! Tu pourrais faire du one-man show toi j’t’assure, t’es ouf !

— One-woman show alors ! reprend Zora en rigolant. Cléa a toujours eu du mal avec l’anglais, et un peu toutes les matières en fait. 

— Hein ? Qu’est-ce que tu racontes ? 

— Ben, woman, faut dire woman ! J’ai l’air d’un mec peut-être ? ajoute Zora en se tâtant exagérément les seins comprimés dans son maillot une pièce. T’es pas allée à l’école toi ou quoi ? 

— J’te signale que je suis dans la même classe que toi et qu’on est assises à côté à tous les cours !

— Ouais, ben c’est pas la 5G dans ton cerveau alors ! 

— Vas-y, c’est pas cool c’que tu dis franchement ! peste Cléa, qui met un peu de temps à comprendre la blague de sa pote.

— Tu m’as tendu une perche ma vieille ! Allez, fais pas la gueule, passe-moi le Closer, qu’on se marre un peu ! C’est l’été, c’est cellulite party ! Je suis sûre qu’en vrai, Emilia Clarke, elle a les fesses aussi rugueuses que son dragon ! se moque Zora, pour que Cléa ne commence pas à tirer la tronche de trop. (Elle est un tantinet susceptible.)

— Obligé meuf ! C’est pas possible toute façon, y a un truc, genre les stars, même quand elles pondent un gosse, elles portent un bikini 2 mois après, ch’ais pas, c’est pas normal quoi !

(Mais pas rancunière).

— C’est sûr que toi en bikini, ça ferait pas vendre beaucoup de numéros à Closer ! En plus, t’es blanche comme un cul !

 — J’y peux rien putain, j’aurais dû acheter du Monoï, tu ferais moins la belle ! On me prendrait pour ta sista ! s’excite Cléa. Faut pas la chatouiller sur son poids, ça la rend dingue. 

— Tu ressemblerais quand même bien à une baleine qui surgit des flots… pour aller s’échouer sur sa serviette remplie de sable… du sable fin et chaud qui s’inscruste bien, surtout dans la raie des fesses rebondies… s’amuse quand même Zora, parce qu’elle adore au fond la mettre en rogne. 

— T’es relou, c’est les 5 kilos que j’ai pris quand j’ai arrêté la clope !

— T’as arrêté 2 jours !

— J’te jure, c’est la clope, j’ai même pas pris un pet de nichon, j’ai la malédiction de la guitare, ça se fout toujours sur le cul !

— Morte de rire, ce qu’il faut pas entendre ! Bon, ma reum va pas tarder à rentrer, on plie tout ?

— Wesh, ‘toute façon, il est nul ce Closer, on parle que de Céline Dion qu’est méga maigre, tu parles d’un scoop, répond Cléa en repliant sa serviette. 

— Attends, j’ai Emilia Clarke en bikini sur Insta ! s’exclame Zora soudainement. Oh merde ! 

— Quoi ? Qu’est-ce qu’elle a ? s’inquiète Cléa en fourrant sa serviette dans son sac. 

— Elle est méga bonne. 

— Pff, putain, on naît pas tous sous le même soleil. 

— Tu l’as dit bouffie, même plage horaire demain ? demande Zora en remettant son T-shirt et son bas de jogging.

— Ouaip. À demain, grosse.

— Fais gaffe au sable entre les fesses. 

— Trop comique toi, t’as vraiment bouffé un clown ! lâche Cléa en refermant la porte de la chambre de Zora, qui planque les magazines Closer sous son lit et qui ouvre encore plus grandes les fenêtres. Pour évacuer l’odeur de cigarette… et pour laisser passer les derniers rayons de soleil qui baignent sa chambre du 9ème étage de la cité des Tournesols de Pierrefitte-Sur-Seine, quartier des poètes.

Cette nouvelle a été remaniée et éditée dans mon recueil BREAKING NEWS. Pour la retrouver ainsi que les 23 autres textes… il n’y a plus qu’à commander !

Alors, que penses-tu de ma plage ? N’hésite pas à me commenter et à t’abonner pour les futures histoires à venir !

29 réflexions sur “Plage de rêve (Agenda Ironique août 2020)

    1. Merci beaucoup ! Je dois avouer que je n’avais jamais lu une seule BD de Claire Brétécher, mais en faisant ma curieuse, j’ai découvert des podcasts d’Agrippine sur France Culture ! Alors merci pour la référence, je vais écouter ça ce matin ! Belle journée, Sabrina.

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      1. Bretécher, fondatrice de l’Écho des Savanes avec Gotlib et Mandrika au milieu des années 1970. Fine observatrice des mœurs de ses contemporains, a publié les Frustrés dans le Nouvel Obs avant de passer à la génération suivante avec Agrippine !
        Bonne découverte et bonne lecture, Sabrina.

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  1. Bon jour Sabrina,
    Diantre, un texte qui brille dans les dialogues et porte la langue d’hier et d’aujourd’hui comme un vrai reflet du vivant des mots et des effets percutants … et de la chute inattendue avec cette plage qui fait la distanciation 🙂
    Max-Louis

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  2. Bonsoir Sabrina,

    J’espère que tu vas bien et que tu prépares ta rentrée tranquillement.
    Eh bien, tu nous sers en cette journée de dimanche un joli plat aux saveurs du language des jeunes haha ! J’avoue que tu as bien respecté l’authenticité des dialogues, et ta chute est bien ficellée, nous nous y attendons pas. Félicitations ! Concernant ta question, bien que cette réalité existe malheureusement, je préfère encore les vraies plages !

    Je te souhaite une belle soirée,

    Rodolphe

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    1. Bonjour Rodolphe ! Je profite des derniers jours de relative tranquillité avant l’ouragan de la rentrée… Merci pour ton retour plutôt complet, et ton assiduité, oui, je me suis amusée pour les dialogues, sans oublier la chute, que je voulais surprenante, et un peu déroutante, tout le monde n’a pas les mêmes chances, et les mêmes paysages de vacances. Belle journée à toi, au plaisir !

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  3. Mdrrrrr Bretecher j’adhère, plus Cellulite qu’Agrippine, quoique….. Une incontournable pour ceux de ma génération. j’avoue que ça ne me réconcilie pas avec les huîtres tout ça, mais ce dial aurait pu aussi bien avoir lieu entre deux de nos cagoles marseillaises, en changeant tant soit peu l’accent !!!
    Merci de ce moment décalé

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  4. Bonjour Bernard, c’est un commentaire franc mais sévère. Ce texte est à prendre pour ce qu’il est, un exercice de style, amusant et léger avec un ton choisi et assumé qui sous-tend malgré tout une problématique réelle, comme j’aime à le faire dans mes nouvelles, dune manière plus ou moins réussie. Mes amis lisent peu ce blog, c’est plutôt des amateurs d’écriture que je retrouve avec plaisir ici. Pour moi, écrire, c’est dire et parfois plaire, ou déplaire. J’ai eu pour habitude de toujours accepter la critique car elle peut être constructive si elle vient étayée, et bienveillante. Merci de ne pas m’envoyer de mail pour me dire à quel point mon texte est calamiteux, cela n’apporte rien à l’écriture. Belle journée, Sabrina.

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  5. Hello Sabrina,

    Cela faisait longtemps que je n’étais pas venue par chez toi et c’est un plaisir de te lire à chaque fois. C’est moderne, terriblement actuel, les dialogues sont truculents et la chute…bravo! Je n’ai rien vu venir.
    Je te souhaite une très belle journée.
    Bizz.

    Stéphanie

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    1. Merci beaucoup Stéphanie pour ton retour qui fait du bien ! Ma rentrée est très intense, et pour l’instant, je n’ai pas une minute pour écrire ou lire d’autres nouvelles, j’espère pouvoir m’y remettre vite car ça me manque ! J’espère que tu vas bien et que tu continues tes projets, au plaisir de te lire sur ton blog, Sabrina.

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  6. Bonjour Sabrina,
    Quel rythme dans ces dialogues où les mots s’entrechoquent dans une langue qui est loin de celle de mon adolescence. Je ne saurai pas écrire avec une telle facilité, le vocabulaire contemporains des ados me ferait défaut.
    En revanche pour la plage…ceux de qui comme moi ont eu la chance de naître sur une île, ou d’avoir la plage, les cocotiers au bout du jardin, nous n’avons pas connu des plages de chambre( bravo pour cette chute inattendue) au 9ème étage. En revanche nous avons tenté d’installé la neige avec des packs de glace du congélo à poisson….franchement pas top.
    A bientôt de te relire.

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    1. Oh merci pour ton message, cela me fait plaisir de te voir ici, et de lire ton commentaire ! J’espère pouvoir très bientôt poster un nouveau texte (je me suis remise à écrire, mais je n’ai pas eu le temps de le transposer sur le blog, aouch, le temps passe trop vite !). J’imagine bien l’expérience de la neige, c’est drôle et inventif, même si ça n’a pas fonctionné 🙂 ! Pour les ados, je les ai côtoyés pas mal, alors ça vient naturellement, même si je ne parle pas ainsi (du moins, pas en classe ) :)! Belle soirée à toi, Sabrina, au plaisir de te lire chez toi !

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