Wild Wild World

Bonjour à tous, c’est dimanche, jour du confinement ! Comme le coronavirus ne s’attaque pas encore à la créativité, j’en profite pour vous offrir un texte qui ne rentre dans aucune case, ni celle du Zodiac, ni celle de l’Agenda Ironique, ni du Bric à Book. Je n’en dis pas plus pour ne rien vous dévoiler, et j’attends vos commentaires en fin de lecture. De mon côté, préparation d’un nouvel Apprentie en herbe, et travail sur mon recueil en parallèle. Si vous ne savez pas quoi faire, et que vous avez maté tout Netflix, parcourez les diverses catégories, la nouvelle (La Bibli roulante) avec mes lectures et je suis en train de réfléchir à une autre dans le futur, dont je vous parlerai en temps voulu ! Beau dimanche à vous, Sabrina.

Les deux hommes se dévisagent, en chiens de faïence. Le premier, petit, râblé, ressemble à un shérif, sans le chapeau, et le deuxième, plus long, plus sec, à un bûcheron avec sa chemise à carreaux. L’atmosphère est suffocante. Personne n’ose bouger. Le silence autour d’eux s’épaissit. On entendrait une mouche voler si c’était la saison. Le temps semble comme suspendu. Suspendu aux crosses des deux flingues, et des deux dingues derrière qui se toisent, le doigt sur la gâchette. Les témoins – espèce devenue rare !– se sont accroupis, priant un Dieu qui a foutu le camp depuis longtemps.

 Clic ! La tension monte. L’homme à l’allure de shérif vient de faire voler le cran de sûreté de son arme à feu.

— Plus rien ne te protège maintenant. Surtout pas la loi.

****

10 minutes plus tôt.

Que personne ne bouge !

Deux jeunes femmes se figent aussitôt. L’une d’entre elles lâche un petit cri, l’autre lui serre violemment le bras.

Y’a du grabuge dans l’air, a le temps de penser le gérant.

— Bougez pas, les mioches, et tout se passera bien, souffle l’homme qui vient de rentrer, une arme à la main.

— Toi, file-moi ce que t’as ! commande-t-il en s’adressant au propriétaire qui, vissé derrière son comptoir, n’a pas quitté la scène des yeux, ni son poste. Il a perdu l’usage de la parole, et de ses jambes.

Les clients avaient déserté la boutique depuis plusieurs jours. Mais lui avait tenu à rester ouvert, parce que c’était pas un froussard. Et qu’il fallait quand même payer les factures. Il regrette sacrément. Voilà ce que c’était d’avoir voulu jouer les gaillards, il allait finir une balle dans la tête, devant ses bouteilles de Ricard.

— Quoi, mais… mais, qu’est-ce que vous voulez ? bafouille et tremble le gérant en se rapprochant de la caisse.

— Tu sais très bien. Dépêche-toi de tout mettre dans le sac, lâche le shérif en posant une énorme besace sur le comptoir.

— Bien, je… je veux pas d’embrouille moi, je suis un honnête homme, je…

— L’honnêteté ! Ah ! Elle a quitté le ranch depuis longtemps ta chère et tendre…. Eh ! Toi ! Qu’est-ce que tu fous ? hurle-t-il en se tournant vers ce qui semble être un trentenaire, tentant de prendre la fuite. Ne bouge plus ! braille-t-il.

— Bouge pas, j’ai dit ! Qu’est-ce que t’as pas capté la première fois ?

— Whoah, whoah, s’il vous plaît, ne me faites rien de mal… supplie le jeune homme, s’agrippant derrière sa sacoche.

— Fais voir ce que t’as pris ! lui ordonne le shérif.

— Ah, ça, c’est un butin qui pèse lourd, mais pas aussi lourd que ta conscience, hein ? lâche-t-il, en souriant d’un air sardonique. Écoute mon garçon, tu vas gentiment vider ton p’tit trésor, et le foutre dans mon sac. Et t’avise pas de jouer au con.

L’homme s’exécute, la sueur perlant sur ses tempes.

— T’en as d’autres ? aboie le shérif.

— Quoi ? Non… C’est tout ce que…

— Et ça, c’est quoi ? Tu te fous de ma gueule ? rugit le shérif en pointant le manteau bombé de l’homme.

— Ça, oui, pardon, oui, mais, c’est pas pour moi, c’est pour ma femme, elle a… elle est très sensible de… du…

— Qu’est-ce que tu dis ? Je pige pas bien !

— Ma femme, elle supporte pas bien tous les…

— FILE-LES MOI TOUT DE SUITE ! crache le shérif en menaçant de son flingue l’homme qui vide son blouson.

— Ça, mon salaud, c’est ce qui s’appelle faire de belles provisions. Et tu croyais filer à l’anglaise avec ce paquet dans le veston ! L’honnêteté, je vous jure, c’est plus ce que c’était.

Il éclate de rire en refermant le sac, rempli à ras bord.

— Lâche ça, vieille charogne ! assène un homme qui vient de rentrer, dans une chemise à carreaux à longues manches du bout desquelles dépasse l’acier d’un pistolet. Le trentenaire, le coeur prêt à lâcher, se jette aux côtés des jeunes filles tandis que le propriétaire profite de cette intrusion pour saisir une bouteille de whisky.

— Tiens tiens… mais qui va là ? murmure le shérif.

— Lâche ton sac, tu m’entends, ou je m’occupe de tes jolies petites oreilles et je t’envoie pour le plus long sommeil.

— Poète en plus, je croyais que ton espèce avait disparu… s’amuse le shérif.

— Ce sont les vermines dans ton genre que cette saloperie devrait exterminer !

— Essaie pas de te frotter à moi, ou je t’explose les boyaux et j’en fais du saucisson !

Les deux hommes se dévisagent, fiers, fiévreux et fielleux. 

****

Clic ! La tension monte. L’homme à l’allure de shérif vient de faire voler le cran de sécurité de son arme à feu.

— Plus rien ne te protège maintenant. Surtout pas la loi, le défie le bûcheron, un rictus sur les lèvres.

Sans attendre, mû par une bravoure insoupçonnée, le gérant fracasse la bouteille de whisky de 12 ans d’âge sur la tête du shérif qui s’écrase aussitôt au sol.

— On peut dire vous avez une bonne poigne. Il est pas près de se réveiller, le bougre ! s’exclame le bûcheron en se précipitant à terre pour ôter l’arme du bandit aux allures de shérif.

— Je, je… sais pas ce qui m’a pris ! balbutie le propriétaire, secoué par les événements, sidéré par son propre mouvement.

— Un conseil, le gérant. Vous n’avez encore rien vu. Ce n’est que le début.

— Comment je pourrais vous remercier, sans vous, je…

— J’ai déjà ma récompense, gérant, répond le bûcheron en se penchant à nouveau. Il prend la besace du shérif.

— Oubliez pas, c’est la jungle maintenant, et les loups disent jamais un putain de merci.

Le menaçant de son arme, le bûcheron claque la porte de l’épicerie, et s’enfuit à travers les rues, le sac dégueulant de rouleaux de papier toilette.

Oui, l’honnetêté, c’est plus ce que c’était, soupire le gérant, face à ses rayonnages vides. 

Cette nouvelle a été remaniée et éditée dans mon recueil BREAKING NEWS. Pour la redécouvrir sur papier, il n’y a plus qu’à commander !

Ça t’a plu ? Dis-moi en commentaire, et abonne-toi, pour pouvoir suivre mes actus !

Crédit Photo : Saloon by Sabrina P

9 réflexions sur “Wild Wild World

      1. De mon côté c’est fait ! Sur une frustration, j’ai rebondi! Mais pour le moment c’est mon seul challenge, c’est plus facile pour moi… Bon courage, je suis sûre que tu vas encore nous sortir un texte sublime !

        Aimé par 1 personne

  1. Drôle d’histoire drôle! Je crois que l’actualité va pouvoir nous inspirer des tas de petites histoires humoristiques et le confinement nous donner le temps de les écrire… Courage! #jesuischezmoi

    Aimé par 1 personne

  2. Merci beaucoup Ève ! J’espère que ce temps-là t’aidera aussi à écrire toujours plus, pour nous donner de la lecture à nous 🙂 ! Belle journée à toi, Sabrina.

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